« Les opinions opposées dialoguent rarement entre elles. »
Disait le philosophe Bernard Manin dans une publication récente sur la question du débat.
Il faisait le constat que le débat n’est pas une chose naturelle, car nous n’aimons pas nous confronter à des opinions différentes.
C’est véritablement ce que nous constatons en médiation : la difficulté d’amener les personnes à cette confrontation. La peur du conflit, la peur de l’expression des émotions qui émergent de ce conflit, l’appréhension de la rupture qui peut se produire par le désaccord, ou de la mise en danger de ses propres acquis.
Mû par ces inquiétudes, on est tenté d’éviter cette confrontation, et empêcher le débat : l’évocation du politiquement correct sert à disqualifier une opinion différente de la sienne. On refuse le dialogue et la confrontation sur le motif que l’idée de l’autre est choquante, ou mauvaise. On empêche ainsi toute discussion, en diabolisant son adversaire. On le réduit au silence, on le neutralise.
Or pour débattre, il faut « accorder de la considération aux opinions opposées… les entendre, chercher à les comprendre ». Entendre ou comprendre ne signifie pas forcément se rallier à cette position, ou se dédire de ses propres convictions.
L’intérêt du débat c’est de dépasser la dimension individuelle, et se porter sur un enjeu collectif de communauté.
Ainsi la liberté d’expression est nécessaire dans le débat : on peut exprimer sans tabou, ni restriction son opinion, si on sait qu’elle sera écoutée, sans dénigrement, et qu’elle pourra être contredite. Mais si le contenu du propos est sans tabou, et peut tout dire, la forme doit respecter des règles de respect, de clarté des propos, de façon a favoriser les échanges.
Un bon débat, n’est pas un échange où les personnes sont d’accord à son issue, mais un échange dans lequel les personnes sont en mesure de s’écouter et accepter que l’idée de l’autre soit contraire à la sienne.
Venez en parler avec nous lors du prochain Café Médiation jeudi 3 décembre 2020 : lien à l’agenda
Les associations de médiateurs, à l’appel du Grand débat national, et du besoin d’animateurs neutres et indépendants, ne prenant pas part au débat, se sont, pour beaucoup, reconnus dans ce rôle ainsi que dans les compétences requises d’animation d’échange, de construction de réflexion commune.
Ainsi un certain nombre d’associations, sous l’impulsion de l’Association Nationale des Médiateurs, s’inscrivent comme ressource et soutien dans l’organisation, et l’animation de débats à mettre en place dans les localités.
Médiation du Rhône est dans le mouvement aussi, et contribue à cette démarche.
Ainsi afin d’évoquer ce rôle nouveau, et les méthodes proposées pour le mener à bien, nous proposons notre prochaine rencontre de Café Médiation sur ce sujet.
Il sera question de la posture à adopter, des méthodes de synthèse des échanges, et du cadre que l’on peut apporter à ces échanges. La mission est ardue, délicate, mais exaltante. Elle appelle aussi chacun à jouer un rôle, à sa façon et à sa portée, dans ce rendez-vous français à ne pas manquer, et dont l’issue ne dépend que de ceux qui y participeront.
Si le Grand Débat n’est pas forcément le lieu de refonte des institutions et de la politique française, il peut au moins être une opportunité de rencontre et d’échanges entre des personnes qui ne se seraient pas écoutées dans d’autres circonstances …
Venez nous retrouver au Café de la Médiation, médiateurs, institutionnels, ou particuliers, afin d’évoquer et construire ensemble les projets de débat, d’échange à venir,
le 7 février 2019, à 8h30,
à la Brasserie Le Moderne, avenue de Saxe, Lyon 3.
S’il s’agit de définir la posture du médiateur, l’écoute est primordiale. Elle compose une des compétences fondamentales du médiateur : il propose en préalable du processus, un temps et un espace dans lequel la personne en demande de médiation va pouvoir s’exprimer, et déposer ce qui l’amène dans cette démarche de recherche de compromis.
Or cette première phase du processus de médiation n’est pas anodine, et se déroule selon des règles spécifiques. Elle marque un moment fort de positionnement de la posture du médiateur. C’est dans ce temps que le médiateur va asseoir le cadre et les limites de son intervention.
Ainsi Il est intéressant d’analyser cette écoute en comparaison à celle d’un thérapeute, à celle apportée par l’assistant social, ou encore celle d’un avocat, expert juridique, ou d’un psychologue.
Parmi les freins au développement de la médiation, on peut compter les réticences fortes développées par certains juges sur cette pratique : la médiation est fréquemment opposée au droit.
Est-ce véritablement la question ?
Un tel constat est dressé lors de la journée d’étude »Justice : état des savoirs » sur le thème »Frontières du droit, frontières de la justice » qui a eu lieu le 27 mai 2016 et organisée par le Ministère de la Justice et l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS
Emmanuel Dockès, professeur à l’Université de Paris Ouest Nanterre la Défense, souligne que les modes alternatifs de règlement des litiges ont le plus souvent pour but d’éviter d’aller en justice et que l’apaisement proposé risque de se faire au préjudice de la partie la plus faible dans bien des cas. Continuer la lecture de L’opposition entre la médiation et la justice→
Les médiateurs de Lyon étaient, cette année encore, présents à la Foire de Lyon sur un stand MEDIATEURS visible dès l’entrée dans l’espace.
C’était l’occasion de constater à quel point les associations et centres de médiation de Lyon s’entendent bien. En effet, ils étaient tous présents côte à côte pour cette action de promotion de la Médiation avec un grand M. Chacun représentant sa spécificité, les différences de formation, d’affinité, de domaine d’intervention… Quel exemple de concertation et de consensus, dans un lieu qui n’est pourtant pas l’endroit évident pour une rencontre de médiateurs !
Comme les discussions ont pu être animées et diverses en ce qui concernait le sujet d’actualité : la médiation de la consommation.
En effet, la pratique de la médiation à la Foire est le type même de la médiation de la consommation. Et les médiateurs qui sont chargés de régler ces différends entre exposants et clients se trouvaient souvent un peu désorientés, en face d’une personne qui était plus en position de réclamant que de médié, et dans une démarche de négociation plus que de médiation.
Alors : médiation ou pas médiation de la consommation ?
A la réflexion, on peut dire qu’il existe bien une médiation de la consommation. Il ne s’agit pas du traitement de la réclamation comme on l’entend, mais plutôt véritablement la prise en compte et l’amélioration de la Relation. Cette situation mérite une appréhension particulière de la demande et une lecture claire des faits et des objectifs.
Parce qu’il y a deux sortes de situation de consommation : la vente de produits, et la vente de prestation. Et quid de la relation entre les acteurs, dans ces deux cas ?
Tout d’abord, pour la vente d’un produit qui nécessite un accord entre l’acheteur et le vendeur, et qui n’engage pas de relation entre les deux personnes dans la durée, il n’y aura pas de place pour la médiation. En effet, il n’existe pas d’intérêt de renouer ou nouer le lien entre deux personnes qui ont eu intérêt à faire coïncider leurs besoins à un moment qui ne dure pas dans le temps. Nous l’avons entendu à plusieurs reprises, lors de nos visites sur les stands des exposants, et cela ne dépend pas du montant de la transaction : les commerçants préfèrent faire « un geste commercial » en cas de conflit, plutôt que de risquer une mauvaise évaluation de leur produit par le client mécontent…
Ensuite, pour une prestation qui ne dure pas dans le temps, les professionnels ne vont pas engager une médiation : la prestation a été rapide, instantanée. Une fois la prestation accomplie, il n’y aura plus de relation avec le professionnel qui ne reverra plus le client. Cette situation concerne la vente des produits qui ne se renouvellent pas, et pour lequel il n’est pas nécessaire de fidéliser le client. Les professionnels dans ces cas préféreront soit faire « un geste commercial », soit faire appel à un expert qui sera moins coûteux et qui leur permettra de répondre à la contestation.
Mais la médiation de la consommation prend toute sa légitimité pour les professionnels qui opèrent des prestations dans la durée, et dont les chantiers nécessitent un suivi de la relation, et un lien de confiance entre le client et le professionnel.
Elle concerne aussi les professionnels qui ont besoin de fidéliser leur clientèle et ne pas rompre le lien commercial, ceux qui vont renouveler la prestation avec le même client, selon ses besoins. Il s’agit des fournisseurs par exemple.
C’est pour ces situations que la médiation est opportune. En effet, comme on le sait, le processus de médiation est axé sur la construction, ou la reconstruction du lien. Il intervient sur la relation entre les personnes. Ainsi dans ces domaines d’activité, la relation commerciale est importante et doit être préservée, pour le client comme pour le professionnel : soit pour maintenir le lien commercial, soit tout simplement pour mener le chantier à son terme, en dépassant les conflits.
Je suis donc convaincue que dans ce contexte on peut justifier de l’intervention du processus de médiation pour reconstruire la relation et la consolider.
Même si les enjeux et les techniques pour conduire l’entretien ne seront pas les mêmes que dans la médiation familiale.
Certaines situations de médiation impliquent la mise en place d’une Co médiation. Il s’agit alors pour deux médiateurs de travailler ensemble, de réunir deux façons de faire ; deux façons d’observer. Co médier n’implique pas juste d’additionner ses savoirs faire, il faut créer ensemble. C’est la possibilité de travailler en complémentarité mais c’est aussi une façon de travailler ensemble dans un métier qui a tendance à être solitaire.
Dans quels cas ?
La Co médiation est un choix. Elle peut paraître bénéfique dans les situations où les personnes accueillies sont nombreuses (au-dessus de 4).
La Co médiation peut aussi se mettre en place à un certain moment du processus, lorsque le médiateur se sent submergé par la situation ou s’il a besoin d’un regard extérieur.
Désormais la médiation s’invite dans tous les domaines : en famille, mais aussi dans les entreprises, dans les relations commerciales, ou les relations de travail.
Face à cet engouement, et cet intérêt grandissant, on constate un phénomène d’improvisation de la pratique, mêlé à l’urgence et à l’enthousiasme.
Il est utile de préciser les fondements d’un tel processus, ce qui fait du médiateur un expert : l’expert de la relation.et la médiation un métier.