Parler des émotions à l’école à
80 enseignants, c’est le défi qu’ont accepté de nous confier des directrices de
collège en ce début d’année scolaire.
Nous sommes tout à la fois des êtres de raison et d’émotions. C’est
encore plus vrai pour les élèves/adolescents. Les émotions sont très présentes
au collège, car l’entrée au collège coïncide avec l’entrée dans l’adolescence,
cette période si particulière du développement, période de transformations, où
les émotions prennent beaucoup de place.
Sensibiliser leurs professeurs
sur ce sujet, a été notre défi avec Isabelle
de la Selle (La clé de l’atelier).
On sait aujourd’hui que les
émotions impactent l’attention, la mémorisation, la relation avec les autres,
la planification, la créativité, le bien-être et donc les apprentissages.
Si nous travaillons généralement
avec les élèves, via notre « parcours de sensibilisation aux émotions à
travers l’art », en ce dernier jour de rentrée pédagogique, ce sont les
enseignants qui ont bien voulu se prêter à l’exercice.
Il a été question de cette
intelligence émotionnelle. Cette capacité à identifier, reconnaitre et gérer
nos émotions. Cette intelligence s’acquiert, se travaille. L’école peut aussi
être le lieu de cet apprentissage. L’exploration collective des émotions est
une piste de travail et passer par l’Art est une alternative à la communication
verbale et un outil qui permet de garder une certaine
« distanciation ». Les adolescents sont très sensibles au
« regard des autres », et cette distanciation peut les aider à entrer
dans le domaine du sensible sans trop se dévoiler.
Nous avons essayé de comprendre
un peu mieux cet élève/adolescent et pourquoi il est « tout »
émotion. Quel professeur n’a pas dû affronter un élève bloqué devant sa copie,
une élève en colère ou un autre en détresse ? Nous avons échangé sur ce
que nous connaissons des émotions et sur ce qu’elles nous disent de nos besoins
satisfaits ou non. L’hyper sensibilité des adolescents a pour conséquence, pour
certains enseignants, de penser les émotions comme un risque (risque d’être
débordé et/ou que les apprentissages se fassent mal). Or leurs émotions sont
aussi un vecteur d’apprentissage.
Nous nous sommes appuyés sur
l’Art, pour travailler ensemble, sur nos propres émotions : L’exploration collective
d’une œuvre permet de réaliser que l’on ne ressent pas tous les choses de la
même façon. On peut s’identifier au « sort » des autres. C’est le
premier pas vers l’empathie.
Faire peindre 80 professeurs a
été notre deuxième défi. Exprimer en peinture une émotion (La Joie) ;
Comprendre ce que l’on ressent, être à l’écoute de son émotion. Beau challenge
pour ces hommes et ces femmes qui vivent parfois leur journée dans la
« tempête émotionnelle » de leurs élèves et dans leur propre émotion.
L’expérience a été passionnante.
Les pastels, les peintures, les rouleaux, les éponges, les pinceaux ont exprimé
la joie sous toute ses formes….explosion, gaité, sérénité, enthousiasme, euphorie,
gratitude, bonne humeur…. Aux dessins se sont ajoutés les mots qui définissent
l’émotion, l’observation qui nous fait prendre conscience de l’émotion et les
ressentis qui nous ramènent au corps.
Merci à ces 80 enseignants et
éducateurs qui ont été à l’écoute de leurs propres émotions pour aller vers
plus de compréhension dans l’émotion des collégiens. Cette empathie dont on a
tous besoin.
Frédérique Moulinier Fuentes/Médiatrice DE